Ce vendredi, nous avons visité l'église de la Madeleine dans le cadre des "Petites promenades dans Paris" (version hiver, bien à l'abri des intempéries éventuelles) proposées par Anne-Marie Guérin à Générations 13.
Des boutiques de fleuristes se sont installées près de l'église au pied des colonnes corinthiennes qui en font le pourtour.
La visite était guidée par Michèle Mazure de l'association "Paris art et histoire". Nous retrouvons le groupe, composé d'une vingtaine de personnes, au pied des marches de l'église.
Nous connaissons bien cette guide depuis le temps que nous suivons ses visites des monuments de la capitale. Elle est toujours passionnante et a tout dans la tête, ce qui m'impressionne beaucoup.
Les travaux vont bon train dans la capitale depuis quelques temps (serait-ce à cause des Jeux Olympiques qui approchent ?) : l'église de la Madeleine n'y échappe pas. Elle est en travaux depuis mai 2021 et le montant total est estimé à 10 millions d'euros. Serait-ce l'une des raisons de l'augmentation de la taxe foncière des parisiens... ? Enfin, 8 millions ont tout de même été financés par la publicité faite sur son échafaudage.
Il faut dire qu'elle a de l'allure ainsi nettoyée !
Vous remarquerez qu'elle se distingue en n'ayant ni clocher ni croix.
Un reportage intéressant sur ces travaux, par la Mairie de Paris
Notre guide nous détaille tout d'abord le fronton de l'église où le Christ trône au centre. Il s'agit du Jugement dernier, une œuvre d'Henri Lemaire (1833).
La dédicace latine "D.O.M. SVB. INVOCAT S. MAR. MAGDALENÆ" peut être traduite par "Au Dieu très bon et très grand, sous l’invocation de sainte Marie-Madeleine".
A gauche du Christ,on voit l’archange saint Michel qui chasse les réprouvés, personnifiés par les Vices (plutôt des hommes, mais pas que...), tandis que Marie Madeleine, agenouillée aux pieds du Christ, implore son pardon.
A la droite du Christ, un autre ange semble être en possession d'un instrument de musique (peut-être une trompette) : il est suivi par des personnages représentant les Vertus. Si on regarde bien, il me semble que les vertus sont représentées par des femmes, non ? Ah ah ah...
J'ai admiré la finesse de la frise qui fait le tour du monument faisant la part belle aux angelots et aux motifs fleuris.
Michèle Mazure nous demande ensuite de nous tourner vers la rue Royale qui fait face à l'entrée de l'église, tout d'abord large et bordée d'arbres, puis plus étroite et sans arbres : elle aboutit à la place de la Concorde (ancienne place Louis XV) dont on aperçoit l'obélisque rapportée par Napoléon de sa campagne en Égypte et permet ainsi aux visiteurs d'avoir une vue sans obstacle sur un autre "temple" parisien, l'Assemblée Nationale. A droite, on aperçoit aussi le dôme doré des Invalides.
Il faudrait juste retirer les voitures et les feux rouges et les remplacer par quelques carrosses pour que l'illusion d'être au XIXe siècle soit parfaite. Peut-être y arrivera-t-on bientôt grâce à Madame Hidalgo, qui sait ? Elle a l'air de vouloir en prendre le chemin !
C'est en effet au XIXe siècle que la construction de cette église fut achevée. Celle-ci s'est étalée sur 85 ans en raison des troubles politiques en France à la fin du XVIIIe siècle (la Révolution) et au début du XIXe siècle où les régimes se sont succédé :
► C'est en 1806 que l'architecte Pierre-Alexandre Vignon en entame la construction. Napoléon Ier veut en faire un temple grec dédié à la gloire de sa Grande Armée.
► Avec la restauration de la monarchie, Louis XVIII lui veut en faire un monument expiatoire à la mémoire de Louis XVI, de Marie-Antoinette, de Madame Élisabeth et du dauphin.
► puis c'est au tour de Charles X et de Louis Philippe Ier de régner : le bâtiment manque d'être transformé en 1837 en gare ferroviaire, la première de Paris.
Que de ministères ont pris de décisions, différentes à chaque fois, à propos de sa construction avant que ce monument ne devienne finalement une église en 1842 !
Nommé avant la révolution de 1830, l'architecte Jean-Jacques-Marie Huvé reprend les travaux et la décoration intérieure (après la mort de Pierre-Alexandre Vignon en 1828) en s'inspirant des thermes de Caracalla et du Panthéon de Rome.
Nous voici maintenant face aux portes monumentales de l'église : celles-ci sont l’œuvre du baron Henri de Triqueti (1937) qui avait paraît-il une excellente connaissance de l'Ancien Testament. J'ai coupé les têtes alors on voit très peu les portes...
Le fronton représente, au centre, Moïse tenant les Tables de la Loi sur lesquelles sont gravés les dix commandements.
Voici photographié ici le haut du vantail gauche
Dans sa partie basse est représenté l'un des commandements : "Tu ne tueras pas".
Et voici le haut du vantail droit
En-dessous, une scène représente un autre commandement : "Tu ne convoiteras pas la maison de ton voisin, ni autre chose qui lui appartienne". J'ai bien sûr oublié les explications de Michèle Mazure sur les détails de la scène.
Si quelqu'un peut m'aider, je suis preneuse.
C'en est fini de l'extérieur : passons à l'intérieur.
Nous sommes plusieurs à découvrir pour la première fois cette église sans bas-côtés et sans transept.
Notre guide, ici à droite de la photo, va nous la commenter dans le détail alors que nous sommes confortablement assis sur des chaises.
Au-dessus des niches abritant diverses statues, Michèle Mazure nous parle de "lucarnes" qui, au final, n'ont pas été créées mais ont été remplacées par des fresques.
L'église n'est donc éclairée que par trois oculus situés dans les coupoles de la nef.
La statue de Saint Vincent de Paul accompagné d'enfants, par Nicolas-Bernard Raggi, est pleine d'humanité.
Le Christ Sauveur par Francisque-Joseph Duret
Cette Vierge à l'Enfant écrase ici un serpent : elle est l’œuvre de Charles Emile Seurre.
J'ai bien aimé la statue de Sainte Amélie par Théophile-François Marcel Bra. Il s'agit d'un hommage à Marie-Amélie de Bourbon Sicile, reine des français et épouse de Louis-Philippe. Le sculpteur l’a représentée un livre à la main, en signe de piété.
Mais celle que je préfère, je l'ai gardée pour la fin, c'est cette Sainte Clothilde par Antoine Barye (il faut dire qu'il n'est pas le sculpteur le moins connu de cette époque), située à l'est de l'église. L'église est en effet orientée Nord-Sud, pour faire face à la rue Royale, contrairement à l'habitude qui veut que le chœur regarde vers Jérusalem, à l'est donc).
Nous voici maintenant face au chœur qui est somptueux. Il est composé de trois étages, une fresque dans la partie haute, une mosaïque dans la partie centrale,
et une sculpture dans la partie basse.
La grille est trop belle, je trouve, avec son petit angelot au centre !
Intéressons-nous d'abord à la sculpture monumentale qui orne l'autel. Elle est l’œuvre de Charles Marochetti et représente le Ravissement de sainte Marie Madeleine. Notre guide nous dit qu'à cette époque beaucoup de femmes s'appelaient Marie : pour la différencier, elle était nommée Marie de Magdala (une localité située sur la rive occidentale du lac de Tibériade).
À la fin de sa vie, retirée dans la grotte de la Sainte-Baume en Provence, Marie Madeleine est ravie en extase : elle est ici "enlevée au ciel" par trois anges qui déploient d'immenses ailes (le troisième est caché derrière, à la gauche de Marie Madeleine sur la photo).
L'autel est encadré à gauche et à droite par deux anges qui prient.
Au centre, on peut admirer une mosaïque de style néo-byzantin du Christ de la Résurrection par Charles-Joseph Lameire sur fond d'or réalisée entre 1888 et 1893. On peut identifier sainte Véronique qui tient le Saint-Suaire.
Sur la gauche du Christ, on voit Marie Madeleine agenouillée avec à côté d'elle des flacons de parfums.
Les disciples du Christ sont séparés par quelques palmiers qui portent des dattes, arbres de la Palestine comme de la Provence.
De l'autre côté, on peut reconnaître (merci internet !) à la gauche du Christ Marthe, la sœur, et Lazare (qui a ressuscité), le frère de Marie Madeleine.
Tout en haut se trouve une fresque de "l'Histoire de la Chrétienté" par Jules-Claude Ziegler (1835-1837). Le personnage central préside à l’histoire du christianisme d’Orient, à sa droite, et d’Occident, à sa gauche. Il bénit une assemblée, entouré des Apôtres, au sommet d’une pyramide humaine installée sur un escalier.
La composition est dominée sur la gauche du Christ par la figure de Napoléon Ier, l’empereur qui mit un terme à la Révolution : en grand manteau parsemé d’abeilles d’or, il se tourne vers Pie VII qui lui remet sa couronne.
A la droite du Christ, donc sur la gauche de la fresque, on peut voir plusieurs papes et rois de France couronnés. Au premier plan, la lutte contre l'islamisme.
Michèle Mazure nous commente ensuite la chaire de l'église, nous rappelant que nous l'avions connue fonctionnelle dans notre jeunesse ! elle est joliment décorée par des macarons des quatre évangélistes (dont j'ai raté les photos !).
Nous passons ensuite devant les deux bénitiers situés à l'entrée de l'église, tous deux surmontés de superbes anges.
On admire ici le travail du marbre...
Au passage, un coup d’œil vers l'orgue Cavallié-Coll...
Au fond, le baptême du Christ par saint Jean-Baptiste
De très jolis fonds baptismaux (dessinés par l'architecte Huvé mais de sculpteur inconnu) surmontés d'un vase porté par quatre angelots agenouillés fort croquants
Le vase est très finement décoré d'une frise consacrée au thème de l'enfance, avec Jésus au milieu des docteurs et le Christ attirant à lui les petits enfants.
Faisant face aux fonds baptismaux, une niche très joliment garnie de mosaïques dorées, met en valeur un groupe qui représente le mariage de la Vierge Marie et de Joseph devant le rabbin.
Michèle Mazure nous fait remarquer le très joli tabernacle qu'il contient.
On peut y voir une colombe volant au-dessus d'un agneau (la Colombe et l'Agneau, ça rappelle quelque chose, non ?), agneau vivant dans un pays où poussent des palmiers et où coulent quatre fleuves...
Le Jardin d’Éden ?
La visite terminée, nous quittons cette belle église en passant entre saint Louis,
et saint Philippe.
Celui-ci est représenté comme un homme âgé et barbu tenant dans les bras une croix, symbole de son martyre (il a été crucifié la tête en bas). Auparavant disciple de saint Jean-Baptiste, saint Philippe fut l'un des premiers à suivre Jésus.
Un grand merci à Anne-Marie pour avoir choisi cette sortie et à Michèle Mazure pour nous avoir fait découvrir cette belle église avec tant de talent.