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Théâtre chinois aux Déchargeurs

Je viens d'utiliser les premières invitations à des spectacles que la Mairie de Paris va m'octroyer chaque mois maintenant que j'ai atteint l'âge canonique de 65 ans : en effet, à partir de cet âge et à condition qu'on habite Paris depuis plus de 3 ans, on se voit offrir par le Maire de Paris 2 spectacles par mois (si on est en couple, on récupère 2 places) dans une salle de spectacle parisienne, sans aucune réserve de conditions de ressources. On va chercher ses places au CAS de l'arrondissement où l'on habite en choisissant les spectacles parmi un choix proposé.

Génial, non ?

J'ai choisi, d'ailleurs sans trop savoir ce que j'irais voir..., deux petites pièces de théâtre d'un auteur chinois né en 1210 et décédé en 1300, Guan Hanking, mises en scène Bernard Sobel : l'une s'intitulait "Sauvée par une coquette" et l'autre "Le rêve du papillon".

J'ai lu une biographie de Guan Hanking qui est très intéressante : je l'ai traduite de l'anglais... Soyez indulgent même si Google Traduction m'a parfois un peu aidée ! he

Guan Hanking vivait au début de la Dynastie Yuan. Il avait de l'humour, était beau et érudit, excellait dans l'écriture de la poésie, était doué pour la musique et... chassait bien ! Il travailla un temps dans un hôpital mais avait en réalité peu d'intérêt pour la médecine et préférait écrire des pièces de théâtre. Celles-ci étaient tout aussi populaires à l'époque auprès de la noblesse que des gens du peuple mais le propos de Guan Hanking était plus d'encourager ces derniers que de divertir les premiers.
Sous la Dynastie Yuan (à l'époque donc où les mongols envahirent la Chine), le peuple vivait misérablement sous l'autorité de fonctionnaires corrompus. Les émeutes étaient fréquentes et beaucoup de gens étaient jetés en prison. Proche de leur cause, Guan Hanking démissionna de son poste de juge pour passer plus de temps à se familiariser avec le peuple et à écrire des pièces qui révélaient la noirceur de leur vie.
Comprenant plusieurs langues, Guan Hanking parvint à faire jouer des pièces montrant la triste réalité, s'attachant surtout à mettre en scène des personnages de femmes d'origine modeste persécutées par la noblesse.
Il écrivit 67 pièces dont 18 sont encore jouées aujourd'hui. En 1958, en Chine comme à l'étranger, on commémora le 700ème anniversaire de son œuvre qui a été traduite en anglais, en français, en allemand et en japonais. Il jouit d'une réputation mondiale de Shakespeare oriental...
 Voici un portrait contemporain de Guan Hanking

 Théâtre chinois aux Déchargeurs

Les deux pièces se jouent au Théâtre des Déchargeurs situé près des Halles. L'entrée sur la rue des Déchargeurs porte une enseigne originale.

Théâtre chinois aux Déchargeurs

Le théâtre est logé dans la cour d'un Hôtel particulier du 18ème siècle.

Théâtre chinois aux Déchargeurs

La salle ne contient que 80 fauteuils (qui viennent d'être changés) et la scène est donc très proche des spectateurs : c'est l'avantage de ces petits théâtres que de voir jouer les acteurs de tout près.

Théâtre chinois aux Déchargeurs

Si vous n'avez pas lu la biographie... sachez que Guan Hanking est aussi vénéré en Chine que William Shakespeare en Angleterre. Témoin et critique de la société de son temps, il met en scène les opprimés, tout particulièrement les femmes.

On découvre dans ces deux œuvres dont l'action se déroule à Bianlang (la capitale de l'époque) un type de théâtre peu courant mais très accessible. Les personnages se présentent et annoncent toujours à l'avance ce qu'ils vont entreprendre avant de le mettre en œuvre : cela m'a parfois fait penser à Molière quand celui-ci fait parler ses personnages en aparté.

La première pièce "Sauvée par une coquette" met en scène une "fille-fleur", c'est à dire une courtisane qui, pour échapper à sa condition, désire répondre aux avances du fils d'un riche sous-préfet, un fonctionnaire donc : la porte d'entrée de la respectabilité. Malgré les conseils de sa sœur qui lui prédit un avenir noir, Yanzhang se marie donc avec Zhou She aux grand regrets du jeune mais désargenté lettré An Xiushi... Très vite, elle subit le mépris et les coups de son époux. Sa sœur, Paner, très féministe somme toute, va lui venir en aide...

La mise en scène est sous le signe du Yin et du Yang : sur une scène immaculée, les acteurs au visage poudré évoluent tout habillés de blanc. Seules couleurs : leurs coiffes noires et leur maquillage rouge. Je n'ai pas trouvé sur le net de photos des coiffes portées par les courtisanes... mais elles étaient vraiment très belles.

Théâtre chinois aux Déchargeurs

Dans la deuxième pièce, intitulée "Le rêve du papillon", une mère éplorée plaide auprès d'un juge apparemment inflexible la cause de ses trois fils qui ont vengé la mort de leur père en tuant son assassin, un grand seigneur. Ici encore, Guan Hanking montre deux classes sociales radicalement opposées, celle des pauvres incarnée par la mère et ses trois fils et celle des nantis incarnée par ce juge qui, tout comme ses pairs issus d'une classe sociale aisée, a eu accès à l'éducation.

Rassurez-vous, l'issue sera, elle aussi, heureuse car le juge saura se montrer rusé pour rendre la justice et au final clément !

J'ai vraiment bien aimé ces deux pièces même si j'ai trouvé quelques longueurs et répétitions dans la deuxième.

Vive la vie parisienne !

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