Ce vendredi, nous avons commencé la balade du "Paris de la Grande Guerre" à la Gare de l'Est. Mes amies Marie-France et Élisabeth étaient de la partie avec leurs parapluies (assortis par le plus grand des hasards...) car cette fois-ci les prières d'Anne-Marie pour avoir du beau temps n'avaient pas été exaucées !
Depuis que la gare a été rénovée en l'honneur de l'arrivée du TGV Est Européen, la grande fresque d'Albert Herter, peintre américain décédé en 1950, a pris position à l'extrême gauche dans le Hall Alsace, celui des départs : on la voit donc dès qu'on entre dans la gare.
Elle s'intitule "Le départ des poilus, Août 1914" et représente un train à l'arrêt devant lequel se presse une foule d'hommes, de femmes et d'enfants venus accompagner les conscrits qui partent au front. Au centre du tableau, un jeune homme brandit, dans une attitude courageuse, d'une main un képi et de l'autre un fusil au canon fleuri : l'idée d'une "guerre éclair" est dans tous les esprits même si les anciens se souviennent encore de la guerre de 70...
Il s'agit en fait du fils du peintre, Everit Harper, décédé au cours de la bataille du bois de Belleau à la fin de la guerre. Albert Herter s'est aussi représenté sur la toile, à droite, un bouquet à la main, sa femme se tenant sur la gauche du tableau : quand il a peint cette toile en 1926, il y a rassemblé en même temps l'insouciance de la jeunesse et la sagesse mêlée de tristesse des anciens.
Cliquez sur l'image pour l'agrandir...
Le fils du peintre "la fleur au fusil"
Le peintre, un bouquet à la main
La femme du peintre, les mains jointes
Au sortir de la gare, la pluie a cessé fort heureusement et nous rejoignons en métro la Place de l’Étoile où se trouve le tombeau du Soldat inconnu. Sous l'Arc de Triomphe, Anne-Marie nous explique qu'il est possible d'assister à la cérémonie de ravivage de la flamme qui a lieu chaque jour à partir de 18h00. Par contre, je suppose que la liste d'attente est longue...
Afin d’éviter que le tombeau du Soldat inconnu ne sombre dans l’oubli, le journaliste Gabriel Boissy suggère en 1923 qu’une Flamme du Souvenir veille nuit et jour sur la tombe sacrée. Le 11 novembre 1923, la Flamme est allumée par André Maginot, alors ministre de la Guerre.
Depuis cette date, elle ne s’est jamais éteinte, même sous l’Occupation.
Une plaque de cuivre au sol rappelle que l'Alsace-Lorraine n'a été rendue à la France qu'en 1918.
J'ai trouvé un schéma qui montre le déroulé de la cérémonie avec les places protocolaires de chacune des parties. Il y a d'abord le dépôt de gerbe (1), puis c'est le ravivage de la flamme par les associations d'anciens combattants (2), suivi par la salutation des invités (3) et enfin la signature du Livre d'Or (4).
C'est à pied que nous descendons les Champs Élysées pour rejoindre le Rond-Point du même nom où se trouve la statue de Georges Clémenceau.
Pas le temps (ni l'argent !) de faire les boutiques mais une petite photo au passage tout de même : les illuminations vont bientôt battre leur plein (il paraît que c'est Omar Sy qui sera chargé cette année d'appuyer sur le bouton magique...).
Des chrysanthèmes : en veux-tu en voilà ! Ils décorent harmonieusement la statue en hommage au "Père la Victoire" érigée, nous dit Anne-Marie, sur un bloc de grès provenant de la forêt de Fontainebleau.
La gerbe du Président de la République (au premier plan) ne "botte" pas trop Annette : tout comme moi, elle préfère celle de LA Maire de Paris (au second plan) qui ne comporte pas de fleurs teintes...
Joli bronze de François Cogné (inauguré le 24 novembre 1932, jour anniversaire de la mort du "Tigre")
Ne m'étant pas bien positionnée par rapport à la statue, je n'avais pas compris l'explication d'Anne-Marie sur le mouvement du cache-col du grand homme (le sculpteur s'étant inspiré de la Victoire de Samothrace) mais, grâce à mon ami internet, me voici au parfum : l'écharpe vole bien au vent !
Un peu plus loin, sur le Cours-La-Reine, se trouve le monument érigé en 1938 par la France en l'honneur du Roi des Belges, Albert 1er, décédé accidentellement dans un accident d'escalade quatre ans plus tôt, et surnommé "le roi-soldat" par son peuple qui lui voue une grande admiration. En effet, tandis que le gouvernement s'exile à Sainte-Adresse, près du Havre, le roi reste en Belgique (il établit son état-major dans la ville de Furnes) pour commander ses troupes.
La statue équestre est d'Armand Martial.
Tout autour du socle de la statue se trouvent des blasons représentant les dix provinces belges. Tout à fait par hasard, j'ai photographié un blason flamand et un blason wallon !
Celui-ci est celui de la Province d'Anvers (en Flandres).
Cet autre est celui de la Province du Brabant Wallon.
De part et d'autre du socle de la statue se trouvent de fort beaux bas-reliefs.
L'un évoque le martyre des villes belges : il est daté de 1914.
Sur l'autre, c'est la victoire de 1918 qui est commémorée.
Longeant la Seine, nous passons devant l'Assemblée Nationale,
et longeons la Grande Roue de Marcel Campion : celle-ci possède maintenant des nacelles fermées alors que je la connaissais il y a une bonne dizaine d'années "à tout vent" : j'en ai des souvenirs cuisants par un mois de décembre... mais, la vue d'en haut en valait la chandelle !
La Place Louis XV ainsi qu'elle était nommée jusqu’en en 1792 (elle prit ensuite le nom de Place de la Révolution puis de Place de la Concorde), est de forme octogonale. Elle est l’œuvre d'Ange-Jacques Gabriel, architecte du Roi ( à ne pas confondre avec l'Ange du même nom...!). Celui-ci y fit construire 8 guérites (qu'on appellera logiquement plus tard "les guérites de Gabriel") pour en marquer les 8 angles. C'est au-dessus de ces 8 guérites que l'architecte de Louis-Philippe, Jacques Ignace Hittorff, érige des statues représentant les plus grandes villes de France (à l'époque).
Deux d'entre elles sont à l'effigie des villes de l'est de la France : celle de la Ville de Strasbourg et celle de la Ville de Lille.
La statue de la Ville de Strasbourg aurait bien besoin d'un petit nettoyage...
Cette statue a été drapée de noir pendant toute la période où l'Alsace-Lorraine était allemande (donc de 1871 à 1918) mais, tout comme Anne-Marie, je n'ai pas trouvé sur le net la moindre photo y faisant référence...
Merci Photoshop !
La statue de la Ville de Lille, tout comme celle de Strasbourg, est ceinte d'une couronne de remparts et est munie d'un sceptre.
Nous enfournant dans le métro, nous débouchons sur les Grands Boulevards à la recherche de la rue du Croissant : c'est en effet dans cette rue et dans un café portant le même nom que Jean Jaurès fût assassiné le 31 juillet 1914 par Raoul Villain, un jeune homme de 29 ans peut-être un peu simple d'esprit mais surtout ultra-nationaliste. Il reproche en particulier à Jaurès son antimilitarisme (celui-ci avait fait l'année précédente un discours devant 150000 personnes au Pré Saint-Gervais pour argumenter contre "la loi des trois ans" qui augmentait d'un an la durée du service militaire)...
Jaurès fût assassiné par 2 balles tirées à bout portant alors qu'il dînait à une table du café, dos à la fenêtre ouverte en raison de la chaleur, avec plusieurs de ses collaborateurs.
Sur la devanture de la Taverne du Croissant (c'est son nom actuel), une plaque de marbre a été apposée pour commémorer l'événement.
A l'intérieur, dans un petit coin du café, un espace est réservé aux journaux de l'époque.
Merci beaucoup Anne-Marie d'avoir préparé et accompagné cette promenade.