Pour cette première promenade de rentrée, Anne-Marie nous avait donné rendez-vous au métro Volontaires situé non loin de Montparnasse dans le quinzième arrondissement.
Quand je suis arrivée sur les lieux, il y avait déjà un bon petit attroupement autour d'Anne-Marie : ses visites sont prisées des adhérents de G13 et le temps, quoiqu'un peu maussade, promettait de ne pas nous apporter la pluie.
Anne-Marie nous fait passer un plan montrant les transformations subies par la Capitale en 1860. Vaugirard et Grenelle, au sud, font partie des banlieues annexées que nous allons visiter cet après-midi.
En rose au centre, le Paris d'avant le Baron Haussman
Après avoir longé cet immeuble assez original de la rue des Volontaires, notre premier arrêt est pour le Bal Blomet, au 33 de ladite rue.
Anciennement Bal nègre - ce vocabulaire est maintenant bien sûr banni de la langue française -, le Bal Blomet est une ancienne ferme du XIXème siècle transformée en cabaret dansant antillais et club de jazz du Paris des années folles. Jean Rézard des Wouves, candidat antillais à la députation, installe d'abord son QG de campagne au N°33 de la rue Blomet puis, pour attirer et retenir le maigre auditoire à ses meetings politiques, il se met au piano et joue avec grand succès la musique de ses origines.
C'est Robert Desnos qui le baptisa ainsi...
« Dans l’un des plus romantiques quartiers de Paris, où chaque porte cochère dissimule un jardin et des tonnelles, un bal oriental s’est installé. Un véritable bal nègre (…) où l’on peut passer, le samedi et le dimanche une soirée très loin de l’atmosphère parisienne. C’est au 33 de la rue Blomet, dans une grande salle attenante au bureau de tabac Jouve, salle où, depuis bientôt un demi-siècle, les noces succèdent aux réunions électorales. »
Le bâtiment actuel vient d'être rénové en vue de sa réouverture en tant que salle de concert (jazz, comédie musicale, musique classique) de près de trois cent places, ambitionnant de renouer avec l'esprit du Bal Nègre de la grande époque.
Entre les lettres du bandeau, le visage de Joséphine Baker qui fréquentait assidûment le bal.
Sur le rideau de fer, un "tag" de la grande époque représentant les artistes qui fréquentèrent ce lieu, tant comme spectateurs que comme artistes. On y reconnait Foujita, Jean-Paul Sartre, Kiki de Montparnasse et Sidney Bechet, entre autres.
Voici la salle de spectacle actuelle : cliquez ICI pour accéder au site internet.
Prenant la rue Lecourbe, nous arrivons au N°91 où se trouve une église orthodoxe russe, Saint-Séraphin de Sarov. Il faut vraiment savoir qu'il y a une église derrière cette austère porte cochère...
Mais dès que l'on entre, on découvre un havre de paix : la campagne à Paris.
L'église se trouve au fond de la cour.
Elle a été construite grâce aux dons, souvent très modestes, des émigrés "russes blancs" vivant nombreux dans ce quartier autrefois populaire.
Grâce à mon ami internet, on peut ici avoir un aperçu de son intérieur que nous n'avons malheureusement pas pu voir, la grille étant cadenassée...
Un peu plus loin, une jolie devanture de fleuriste...
Un peu partout dans le quartier de beaux étals de fruits et légumes avec des coloquintes en particulier : l'automne n'est pas loin d'arriver !
Le N°18 de la rue du Général Beuret a attiré mon attention : il s'agit d'un très bel immeuble Art Nouveau.
C'est surtout la porte, circulaire, qui est d'une grande originalité. Son architecte est Eugène Petit (celui du cimetières des chiens à Asnières).
Nous voici devant le Square de Vergennes qui prend dans la rue de Vaugirard au niveau du N°279 et qui se termine en impasse.
Un très joli bananier a l'air de bien y prospérer.
Au bout de l'impasse, un immeuble - maison et atelier du maître-verrier Louis Barillet - construit en 1932 par l'architecte Robert Mallet-Stevens, contemporain et concurrent de Le Corbusier.
Anne-Marie nous a expliqué qu'il avait eu moins de succès que ce dernier du fait qu'il s'était plutôt adressé à une clientèle riche alors que Le Corbusier a fait des immeubles d'habitation pour les classes populaires.
Il me semblait bien avoir reconnu dans cet immeuble le "Musée Mendjisky-Ecoles de Paris" que j'avais visité lors de son ouverture en 2014. J'apprends par le net qu'il est définitivement fermé.
What a shame...
J'avais fait à l'époque un petit post sur ce très intéressant musée : si ça vous intéresse, c'est ICI.
Le musée Mendjisky devrait réouvrir dans des locaux moins onéreux à la location... mais quel devenir pour l'immeuble de Mallet-Stevens... ? That is the question.
Une petite halte réparatrice dans le Square de la rue Adolphe-Chérioux coincé entre la rue de Vaugirard et la rue Blomet, tout à côté de la Mairie du XVème.
Une belle maternité d'Adolphe-Amédée Cordonnier
Plus académique L'Histoire inscrivant le centenaire, sculpture commémorant la Révolution d'Emile-François Chatrousse
Empruntant la rue Bausset, nous nous dirigeons vers l'église de Vaugirard.
Mais d'où vient le nom de Vaugirard... ?
Au XIIIème siècle, 300 habitants s'étaient rapprochés des terres cultivées par les moines. En mémoire de l'abbé Gérard de Moret, prieur de l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés sous Saint-Louis, cet endroit jusqu'alors dénommé vallées des étables, devient le val Gérard puis Vaugirard.
Au passage, un immeuble intéressant : pour son architecture Art moderne
En voyant l'église Saint-Lambert de Vaugirard (qui date de 1853), on s'aperçoit que l'automne a pointé le bout de son nez...
Du temps, lointain maintenant, où j'exerçais encore..., cela signifiait la rentrée des classes et les enfants qui arrivaient à l'école les mains pleines de châtaignes !
Sur le parvis de l'église, Anne-Marie nous fait remarquer des empreintes de coquillages... Ici a été tournée une célèbre scène du film "La mariée était en noir" de François Truffaut.
Au-dessus du porche, une sculpture en ronde-bosse représente le Christ entouré de la Vierge et d'un ange.
Autour du clocher - d'une hauteur de 50 mètres - les trois évangélistes
Vue la position élevée de ces évangélistes, j'ai dû chercher sur le net pour trouver cette photo de Saint Marc (Photo TripAdvisor)
et de Saint Matthieu si je ne me trompe (Photo TripAdvisor)
Elévations néo-romanes du choeur
La croix de Saint-Lambert, en premier plan, est une oeuvre de Mireille Bouchard créée pour le Jubilé de l'an 2000 : elle est en bois doré recouvert de feuilles d'or.
Au sortir de l'église, une belle vue sur notre tour nationale
Le monument aux morts du XVème et au fond la Mairie
Le panonceau du square Saint-Lambert où nous sommes maintenant nous en apprend un peu plus sur le Saint du même nom.
Il rappelle la triste fin de Lambert, qui lutta toute sa vie contre les pratiques païennes, ce qui lui valut d'être transpercé par un javelot, alors qu’il était en prière dans sa chambre, en 705. Il est le protecteur des personnes atteintes de la maladie de la pierre et de hernies.
Autrefois s’élevaient ici les anciennes usines à gaz de Vaugirard, qui s’étendaient sur près de six hectares. Elles ont fonctionné de 1835 jusqu’au début du 20e siècle. Les usines ont cédé la place à ce vaste jardin en 1933, à l’instar de nombreux immeubles que vous apercevez du jardin, d’un style typique des années 30. Ici, nous faisons face au Lycée Camille Sée. Il est nommé ainsi en l'honneur de l'homme politique Camille Sée qui entreprit des réformes en faveur de l'éducation des jeunes filles sous la Troisième République.
Ce chien-loup est l'oeuvre de René Paris (1928)
et ces oursons, celle de Victor Peter (1928)
Trop craquants, non ?
Au bout du square, le bas-relief d'Auguste Guénot : La Jeunesse (1934)
Joli magasin de Bonsaï rue de la Croix-Nivert
Cette voie prit le nom de rue des Entrepreneurs du fait qu'elle fut lotie et bâtie sous l'impulsion d'entrepreneurs de l’ancien village de Grenelle du XIXème siècle qui possédaient les terrains bordant la rue et qui permirent leur développement, en particulier Jean-Léonard Violet et Alphonse Letellier.
Harmonieuses rondeurs dans ces bow-windows...
Au carrefour de la rue des Entrepreneurs et de la rue Mademoiselle, l'église Saint-Jean-Baptiste de Grenelle, au coeur du nouveau village de Grenelle créé par Jean-Baptiste Violet. C'est "Mademoiselle", la petite fille de Charles X qui - à 8 ans - en posa la première pierre en 1827.
Un peu plus loin, au métro Félix Faure, un immeuble qui ne peut pas laisser indifférent...
Il se situe au 24 place Etienne Pernet et date de 1905.
Pour trouver plus Art nouveau, il faut se lever de bonne heure !
Nous voici maintenant arrivés dans le square qui rend hommage à Jean-Léonard Violet, le bâtisseur du village de Grenelle. Ci-dessous, la maison qu'il s'est fait construire : on n'est jamais si bien servi que par soi-même, non ?
De superbes arbres y déploient leur ramure automnale.
Un kiosque à musique, détruit lors de la tempête du 26 décembre 1999 a été reconstruit à l'identique.
L'immeuble donnant sur la Place Jean-Léonard Violet : une très belle architecture, je trouve.
Sur la Place du Commerce, l'ancienne Mairie du village de Grenelle
Son petit jardin sert de laboratoire aux enfants des écoles.
Une étonnante échoppe dans la rue du Commerce : "Lulu dans ma rue", c'est le nom de cette enseigne.
Lulu dans ma rue, c'est l'histoire d'un quartier... Un quartier optimiste qui croit en l'avenir, un quartier qui a très envie de remettre de l'humain dans son quotidien et du lien entre ses habitants. Un quartier qui pense que lutter contre le chômage peut commencer ici et maintenant en créant de l'activité à l’échelle locale. Un quartier où les compétences et les talents de chacun sont valorisés.
Une petite vidéo pour mieux découvrir cette amusante invention.
Rue du Théâtre : j'ai pris la photo pour le chien dans le caddie de sa maîtresse !
Dommage : j'ai loupé le moment où il me regardait...
Située dans le nouveau lotissement de Grenelle, la salle de spectacle du théâtre de Grenelle est inaugurée en 1828. Du fait de la médiocrité des spectacles proposés, le théâtre périclite rapidement et ferme définitivement en 1929, année au cours de laquelle il est entièrement démoli.
Il est alors remplacé par un immeuble de logement avec bow-windows et parements de briques rouges avec, en rez-de-chaussée, une salle de cinéma, le "Palace Croix-Nivert", inauguré en décembre 1931.
Un temps utilisé comme salle municipale pour diverses activités culturelles - musicales notamment -, le bâtiment à la façade miraculeusement conservée intacte abrite maintenant un lieu de prière pour les ismaéliens de Paris (une secte chiite apparemment).
Plan du parcours
47 minutes (sans s'arrêter...) et presque 4 kilomètres
Merci Anne-Marie de nous avoir guidés une fois de plus