Suite à notre promenade dans le centre historique de Dijon (c'est ICI), nous sommes, Arlette et moi, allées visiter le musée des Beaux-Arts. Celui-ci est hébergé dans l'ancien Palais des Ducs de Bourgogne dont une aile se trouve dans la rue Rameau.
On entre dans le palais ducal par la Cour de Bar dont l'entrée est richement décorée.
La tour de Bar a été élevée entre 1366 et 1372. Il s'agit de la partie la plus ancienne du palais ducal.
La galerie de Bellegarde (voir sur la photo ci-dessous) a été édifiée un siècle et demi plus tard.
Entre les deux, l’escalier de Bellegarde est décoré dans le style de la Renaissance. Il avait son symétrique à l’autre extrémité de la galerie, jusqu’à la construction, au XVIIIe siècle, de l’aile est du palais, avec d’abord l’escalier du Prince, puis l’école de dessin.
Au pied de l'escalier de Bellegarde, un monument à Claus Sluter, sculpteur ayant beaucoup travaillé pour les ducs de Bourgogne.
Les sœurs Leconte...
C'est pas beau de vieillir !
De l'autre côté de la cour, un joli puits
Nous voici entrées dans le nouveau musée entièrement rénové il y a peu.
Nous commençons par la peinture du Moyen-Age avec "Le couronnement de la Vierge" (1473 ou 1474) par Zanobi Machiavelli.
Cet épisode qui suit l'Assomption est tiré des textes apocryphes et reste populaire à cette période. La composition chargée, aux couleurs grinçantes, laisse paraître une outrance et des bizarreries propres à l'œuvre tardive du peintre.
"Le Christ et les apôtres" (Italie - première moitié du Vème siècle) - plaque en ivoire d'éléphant
Cette scène représentant l'enseignement du Christ s'organise en cercles concentriques autour d'une boîte à rouleaux. Elle s'inscrit dans la tradition paléochrétienne (Christ imberbe). A l'origine ou en remploi, cette plaque peut avoir orné une reliure.
"L'adoration des Mages" par Bragio d'Antonio (1446-1516) - Tempera et huile sur bois
Cet élément, sans doute de prédelle, partie basse d'un retable, s'inspire d'un modèle de Mantegna. Sa restauration a révélé un repeint sur le visage du roi qui semblait noir pour s'adapter ultérieurement à la figuration des mages incarnant les trois continents.
"Vierge à l'Enfant" - première moitié du XIVème siècle (Italie)
Thème récurrent de l'iconographie chrétienne, le culte marial devient plus intime et tendre au XIVème siècle. Cette sculpture mêle les influences stylistiques du gothique, notamment français, et de la production siennoise.
"Le Christ au tombeau" entre la Vierge, Saint Jean l'évangéliste, Sainte Catherine à gauche et Sainte Barbe à droite - Huile sur bois (vers 1443)
La mise au tombeau est la dernière station du chemin de croix du Christ. L'œuvre témoigne des évolutions de la peinture flamande où la lumière donne du volume aux corps.
Saint Sébastien - Volet de retable en bois (Suisse ou Allemagne du sud - début du XVIème siècle)
Lors de la persécution des premiers chrétiens à Rome, saint Sébastien est arrêté par l'empereur Dioclétien pour avoir soutenu la foi chrétienne. Il est condamné à être criblé de flèches mais survit à ses blessures. Il sera finalement tué à coups de verge.
Saint Jean endormi attribué à Martin Hoffmann, natif de Bâle - tilleul avec traces de polychromie (vers 1515)
Il s'agit probablement d'un fragment d'une composition représentant "La prière du Christ au Mont des Oliviers". La figure reprend le geste caractéristique de saint Jean dans le relief de même thème, à l'église Saint-Sebald de Nuremberg sculpté par Veit Stoss en 1499.
Saint Fridolin, accompagné du mort qu'il a ressuscité par le Maître à l'Oeillet de Baden (peintre actif à la fin du XVème et au début du XVIème siècle
Saint Fridolin était l'abbé de Säckingen (Allemagne).
Le Moyen-Age en Bourgogne au XVème siècle : à partir du XVème siècle sous le gouvernement des Ducs, la Bourgogne et la Flandre sont le centre d'une intense activité économique et culturelle dominée par une bourgeoisie entreprenante. Les peintres bourguignons s'ouvrent au nouveau style inventé en Flandre, où s'expriment un profond sentiment de la nature, un intérêt pour la perspective et un souci d'humanisation des figures.
Voici en effet la carte des acquisitions des Ducs de Bourgogne...
"La Nativité et l'Adoration des Bergers" par le Maître de Flémalle (probablement un des peintres de l'atelier de Robert Campin né en 1375 et actif à Tournai entre 1406 et 1444) - Huile sur bois
Le tableau rassemble en une scène unique plusieurs épisodes de la Nativité du Christ : le récit de la naissance de Jésus dans la crèche et l'Adoration des Bergers est tiré des Evangiles. L'histoire des sages-femmes provient des Evangiles apocryphes.
"La Vierge allaitant l'Enfant Jésus" - copie d'après le Maître de Flemalle ? - Huile sur bois
Le thème de la Vierge allaitante est à associer à l'iconographie de la Vierge de tendresse qui se développe à la fin du Moyen-Age. Les artistes tentent en effet de représenter le couple mère-enfant de manière plus humaine, en choisissant notamment ce moment d'intimité.
"Christ couronné d'épines" par Albrecht Bouts - Louvain (Belgique) 1549 - Huile sur bois
Le panneau provient de l'ancienne Chambre des Comptes de Dijon. Au XIXème siècle, il était encastré dans une salle du Palais de Justice qui servait de prison. Au revers du panneau, le peintre a commencé une esquisse du visage du Christ.
Nous traversons une très belle salle au plafond en nef de bateau recouvert de lattes de bois.
Les fenêtres donnent d'un côté sur la place des Ducs de Bourgogne,
et de l'autre sur la cour de Bar.
Dans cette salle se trouve un retable absolument extraordinaire : "Le retable de la Crucifixion" de Jacques de Baerze (sculpteur actif à Termonde à la fin du XIVème siècle) et Melchior Broederlam (peintre actif à Ypres de 1381 à 1410) - bois doré et polychromé (1390-1399)
Commandé pour la Chartreuse de Champmol en 1390, le retable fut réalisé en Flandre. Sculpté à Termonde en 1391 par Jacques de Baerze, peint et doré à Ypres de 1393 à 1399, il fut mis en place en 1399.
Il mérite d'être détaillé...
Le retable s'ouvre sur plusieurs figures de saints : saint George, sainte Marie-Madeleine, saint Jean l'Evangéliste, sainte Catherine and saint Christophe.
Au centre, la Nativité et l'Adoration des Mages
Suit, la Crucifixion
Puis, c'est la Mise au Tombeau.
Il se referme sur les figures de saint Antoine, sainte Marguerite, saint Louis, sainte Barbe et saint Joseph.
Dans la même salle, un autre très beau retable : "le Retable des Saints et Martyrs" des mêmes auteurs. Il a été exécuté entre 1389 et 1399.
Il figure à la partie centrale les scènes de la vie de saint Jean-Baptiste, de sainte Catherine et de saint Antoine qui font écho aux dévotions personnelles de Philippe le Hardi. Contrairement au premier retable, celui-ci porte la marque de son commanditaire : sur le bandeau inférieur, alternent les initiales et les armoiries de Philippe le Hardi et de Marguerite de Flandre. Sur les volets latéraux des deux retables, se succèdent des effigies de saints et de saintes, en partie identifiables grâce à leurs attributs. Il s’agit essentiellement de saints intercesseurs particulièrement vénérés à cette époque.
Dans ce retable, des petits diables se cachent partout...
Nous voici maintenant arrivées dans la salle où sont exposés les tombeaux des Ducs de Bourgogne. On a une vue plongeante en montant un petit escalier conduisant à un balcon depuis lequel les musiciens jouaient à l'époque où cette pièce était une salle de réception. Des instruments de musique de l'époque y sont d'ailleurs présentés :
Viole de gambe ténor et son archet : ce bas instrument à cordes frottées était tenu entre les jambes, ce qui explique son nom (ah, j'ai appris quelque chose !). Il domine la vie musicale européenne dès le XVème siècle et existe en plusieurs tailles : dessus, alto, ténor, basse à 6 ou 7 cordes. La présence de "frettes" qui divisent la touche le rapprochent du luth.
A droite du luth Renaissance, plusieurs instruments à vent (flûtes à bec)
Une cornemuse et un cornet
Vous remarquerez l'extraordinaire cheminée...
Les tombeaux de Philippe le Hardi et de Jean sans Peur proviennent de la chartreuse de Champmol. Ils ont été magnifiquement restaurés après les vicissitudes de la Révolution française et installés en 1827 dans la grande salle du palais.
Voici les deux gisants de Jean-sans-Peur et Marguerite de Bavière.
Quelle grâce dans ces petits anges !
Ces tombeaux sont surtout renommés pour leur cortège de pleurants enveloppés dans des manteaux aux généreux drapés qui portent le deuil éternel des souverains et expriment toute la variété des sentiments d'affliction et d'espoir.
L'autre tombeau est celui de Philippe le Hardi, le père de Jean-sans-Peur : le voici photographié du côté des petits anges.
Et voici un pleurant de son tombeau (photo du musée) : certains d'entre eux firent l’objet de discrets rehauts d’or et de couleurs par Jean Malouel, peintre officiel de la cour ducale, comme celui-ci...
Quatre pleurants néogothiques sont des acteurs de la restauration des tombeaux : voici celui de Claude Saint-Père (1777-1854), architecte et maître d'œuvre de l'opération. Il est représenté en redingote sous le manteau, portant le compas qui l'identifie.
Dans une pièce voisine, on peut admirer des sculptures provenant de la Chartreuse de Champmol.
En 1384, Philippe le Hardi fonde une Chartreuse au lieu-dit Champmol. Le décor est confié aux meilleurs peintres et sculpteurs issus du milieu parisien ou des riches villes des Pays-Bas et du nord de la France tel Claus Sluter à qui l'on doit les statues du Puits de Moïse.
Il s'agit des bustes des prophètes et des anges du Puits de Moïse (1402-1403). Le puits de Moïse est le vestige d'un calvaire situé au milieu d'un puits autrefois au centre du grand cloître de la chartreuse de Champmol.
Vue sur le nouveau musée...
"Le Bon Larron et le Mauvais Larron" - Pays-Bas du sud (vers 1520-1525)
Ces deux statuettes proviennent probablement d'un grand retable où elles figuraient de part et d'autre du Christ en croix, dans une scène de la Crucifixion qui devait être animée de nombreux personnages. Les deux Larrons partagent le supplice du Christ, mais sont traditionnellement représentés ligotés à une croix en forme de tau (T) les bras passés derrière la traverse. Le Bon Larron se trouve à la droite du Christ, calme et résigné. Il regarde le Sauveur avec confiance, tandis que le Mauvais Larron, à sa gauche, se tord dans ses liens et détourne la tête.
"Sainte Barbe" - Pays-Bas du sud Anvers ? (début du XVIème siècle)
Un aperçu sur la peinture italienne du Moyen-Age : le temps se fait long, il faudra revenir au musée...
"Vierge à l'Enfant" (Renaissance peut-être ?)
Plat : Actéon changé en cerf - Urbino (XVIème siècle)
Tiré des "Métamorphoses" d'Ovide, ouvrage très en vogue à la Renaissance, le sujet représente Actéon, qui est changé en cerf après avoir surpris Diane au bain. Il sera dévoré par ses chiens représentés à côté de lui.
Faïence à décor de grand feu : "L'Abondance" par Benedetto Buglioni (Florence 1461-1521) - vers 1500
L'allégorie de l'Abondance, personnifiée par une jeune canéphore, se caractérise par la présence d'une corne d'où débordent fruits et fleurs. Selon la tradition, ces statues allégoriques étaient offertes par celui qui souhaitait transmettre ses vœux de prospérité à une maison amie.
A côté de "L'Abondance", un vase balustre de Giovani Maria (vers 1520) et un vase de pharmacie en forme de cylindre (Italie - vers 1480)
Nous quittons ce beau musée sur cette vue de la place de la Libération...
Une très belle visite mais il faudra y retourner...
Le musée cache bien d'autres trésors !