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Par Tolbiac204 le 23 Novembre 2017 à 23:00
Je suis allée la semaine dernière avec ma soeur voir une exposition au Petit-Palais intitulée "L'art du pastel - de Degas à Redon". Vous vous doutez bien qu'elle m'intéressait particulièrement puisque depuis un peu plus d'un an je m'adonne, modestement, à ce loisir de temps en temps, ce qui me procure beaucoup de joies.
Voici le magnifique portail d'entrée du Petit-Palais. Le musée n'a pas encore ouvert ses portes aux visiteurs qui font déjà la queue. Le titre de l'exposition est accrocheur : il attire donc du monde...
Superbe escalier, non ?
Ugolin par Jean-Baptiste Carpeaux (plâtre patiné)
Ugolin, tyran de Pise, enchaîné et muré dans la tour de la Faim avec sa progéniture (Divine Comédie de Dante). En le voyant se mordre les mains de désespoir, ses enfants lui proposent, par pitié filiale, de se faire dévorer...
Mais venons-en à nos pastels : 120 sur les 221 que possède le musée sont ici exposés à la lumière alors qu'ils sont d'habitude soigneusement conservés au noir.
J'ai découvert à l'occasion de cette exposition une technique nouvelle : celle qui consiste à utiliser un papier coloré pouvant servir comme base pour les fonds. J'ai aussi découvert une multitude de peintres que je ne connaissais pas : le pastel a toujours été considéré - à tort peut-être car aussi beaucoup utilisé par les femmes peintres - comme un art mineur.
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La belle bouquetière (Norbert Goeneutte - 1888)
Pastel sur papier gris collé sur toileCe pastel est inspiré du portrait de la Marquise de Pompadour en bergère de Carle Van Loo (huile sur toile vers 1760 - Château de Versailles) mais ne reprend pas les traits de celle-ci. La composition, le coloris, l'exaltation de la nature ainsi que l'usage du pastel, en font un bel hommage à l'art du XVIIIème siècle.
Portrait de Mademoiselle Erhler (Léon Riesener - 1861)
Pastel et fusain sur papier gris collé sur toileAu Salon de 1851, Léon Riesener présente 12 pastels, affirmant clairement son goût pour ce matériau qu'il a découvert très tôt. Le portrait de cette petite fille au cerceau, dont le fini rivalise avec celui de la peinture, est exemplaire par la maîtrise du rendu des chairs et des matières, et la fraîcheur des coloris.
L'original est dix fois plus beau que cette photo...
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LE PASTEL NATURALISTE
Si le pastel est très en vogue au XVIIIème siècle, il trouve un véritable renouveau dans le premier quart du XIXème puis au début du XXème siècle. La nouveauté du médium offre une alternative séduisante à la classique peinture à l'huile.
Les paysagistes sont très désireux à cette époque de sortir de l'atelier pour aller au contact de la nature. Ils s'emparent du pastel qui est un matériau léger et peu encombrant ne nécessitant pas de préparation ni de temps de séchage.
L'embâcle de la Seine entre Asnières et Courbevoie (Alexandre Nozal - 1891)
Pastel et et crayon graphite sur toileRemarquable, ce pastel : j'adore !
Alexandre Nozal délaisse parfois les bords de Seine pour parcourir la France, mais aussi la Hollande, l'Espagne et l'Algérie. Il représente à plusieurs reprises les bords du lac Léman.
Nocturne : le lac Léman - souvenir de Villeneuve (1895)
Pastel et aquarelle sur papier marron collé sur toileJoseph-Félix Bouchor (soleil et neige - avant 1915)
Crayon graphite - Pastel sur papier collé sur toileUn petit air de Claude Monnet, non (Cf. La Pie) ?
Il s'agit du village de Freneuse, situé au bord de la Seine, où l'artiste résida pendant plusieurs années. Le sol terreux et le ciel nuageux sont rendus grâce au papier chamois savamment laissé en réserve par l'artiste.
Plus largement, le medium est utilisé pour tous les sujets de la vie moderne, scènes populaires ou intimes, qui réclament un traitement neuf, simple et spontané.
Théophile-Alexandre Steinlen - La sortie des midinettes (avant 1907)
Pastel et fusain sur papier
Fasciné par le grouillement perpétuel de la rue, l'artiste "croque" les jeunes couturières des grandes maisons de mode de Paris qui "faisaient dînette le midi".Fernand Pelez - Danseuse penchée en avant pour ajuster son collant (1905)
Crayon noir avec rehauts de blanc et de pastels rose et jaune collé sur toileLà encore, il faut voir l'original...
Guillaume Roger - Petite fille hollandaise (avant 1916)
Pastel sur papier collé sur toileL'artiste a effectué de nombreux pastels sur ce sujet. A l'aide d'un cerne jaune pâle il souligne les contours du visage de la petite fille, ce qui donne l'illusion d'effets de contre-jour.
Superbe dans la simplicité
Paul-Albert Bartholomé - Tête de mendiante (1882)
Pastel et mine de plomb sur papier gris-bleu collé sur cartonL'artiste réalise ici le portrait d'une vieille paysanne coiffée d'un foulard. Il s'agirait de "la mère Sophie" qu'il avait prise comme modèle à Bouillant, près de Crépy-en-Valois.
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LE PASTEL IMPRESSIONNISTE
Pour traduire des sensations instantanées, le pastel s'impose comme une évidence auprès des artistes impressionnistes. Edgar Degas, Mary Cassatt, Armand Guillaumin, Paul Gauguin, Berthe Morisot et Auguste Renoir s'y sont essayés.
Avant tout paysagistes, les artistes impressionnistes ne délaissent pas pour autant la représentation humaine pourvu qu'elle soit rendue dans la réalité du quotidien.
Berthe Morisot - Dans le parc (vers 1874)
Pastel sur papier brun collé sur toileIl s'agit de la soeur de l'artiste assise dans les herbes hautes en compagnie de ses deux fillettes.
Edgar Degas - Madame Alexis Rouart et ses enfants (vers 1905)
Pastel et fusain sur papier calque collé sur cartonCe portrait familial met en scène une dispute entre la mère et sa fille. La dégradation de la vue de l'artiste à cette époque ne lui permettait pas la précision du tracé indispensable pour créer des portraits.
Armand Guillaumin - Artiste à son chevalet (1872)
Pastel sur papier bleuL'artiste excelle dans la pratique du pastel qu'il pratique entre 1865 et 1921. Il s'agit ici d'un ami du peintre "surpris" en train de peindre lui-même. Les taches éclatantes du pastel rapidement posées suffisent à rendre les volumes et à triompher de la ligne.
Mary Cassatt s'attache tout au long de sa carrière à dépeindre le sentiment d'amour maternel. Dans le tableau qui suit, le visage de la mère n'est qu'esquissé en haut à gauche mettant en valeur le visage de la fillette.
Mary Cassatt - Margot Lux avec un large chapeau (vers 1902)
Pastel sur papier gris-bleu collé sur cartonSuperbe ce contraste entre le visage abouti et l'entourage ébauché
Toujours de Mary Cassatt - Sara avec son chien (vers 1901)
Edgar Degas - Danseuse à l'éventail (vers 1876)
Pastel et fusain sur papier vergéDans les années 1880, le peintre obtient ses entrées à l'Opéra Garnier : il va dès lors nourrir son travail des gestes du quotidien et de l'intimité des ballerines. Degas construit d'abord son dessin au fusain pour donner forme et volume, puis introduit la couleur avec de légères touches de pastel sur les épaules, les bras, l'éventail et les chaussons.
LE PASTEL MONDAIN
James Tissot - Berthe (vers 1882-1883)
Crayon graphite et pastel sur papier gris collé sur toileCe portrait d'une jeune fille accoudée sur un sofa s'inscrit dans le prolongement de la tradition des pastels du XVIIIème siècle.
J'aime beaucoup.
Pierre Carrier-Belleuse - Tendre aveu. Mlle Litini et Mlle Barriaux de l'Opéra (1894)
Pastel sur toileOn peut admirer la finesse de la collerette du Pierrot et la délicatesse du tutu de la danseuse.
Emilie Guillaumot-Adan - Au soleil (vers 197)
Pastel sur papier collé sur toileL'artiste privilégie, sur fond de verdure, l'intimité et l'introspection du modèle aux yeux mi-clos.
Victor Prouvé - Etude de femme les yeux fermés (avant 1907)
Pastel et fusain sur papier collé sur cartonIl s'agit ici d'un dessin préparatoire à une commande de décor.
J'aime bien ici aussi le côté inachevé du dessin.
LE PASTEL SYMBOLISTE
Le pastel est utilisé avec prédilection par les peintres symbolistes à la fois pour ses couleurs et pour sa matière vaporeuse. Les artistes expriment leurs sentiments, leurs rêves, et traduisent esthétiquement une réalité intérieure à la portée plus universelle que les portraits ou les paysages. Ils privilégient les climats de mystère et d'étrangeté propices à la rêverie et à idéal poétique...
Lucien Lévy-Dhurmer - Portrait de Lise et Antoine Mayer (1828-1829)
Pastel sur papier gris-bleu collé sur boisTrès jolie cette évanescence
Toujours de Lucien Lévy-Dhurmer - Grand nu de dos (non daté)
Pastel sur papier gris-bleu collé sur toileLes portraits réalisés au pastel par Levy-Dhurmer remportent un vif succès auprès du public et des critiques. L'artiste utilise ici une méthode chromatique raffinée adaptée du divisionnisme de Georges Seurat.
On pense à David Hamilton...
Charles Léandre - Sur champ d'or (1897)
Pastel sur toileLe modèle serait Fanny Zaessinger, actrice au Théâtre de l'Oeuvre et égérie montmartroise de la Belle Epoque. Le cadre votif monumental, conçu par l'artiste, participe aussi de la vénération pour son modèle.
C'est cette toile qui, à juste titre, fait l'affiche de l'exposition.
Odilon Redon - Anémones dans un vase bleu (après 1912)
Pastel sur papier gris collé sur cartonLes fleurs ont toujours été pour l'artiste un sujet d'étude et un objet de rêve. Il dépasse ici la stricte copie pour proposer une composition florale essentiellement suggestive et poétique.
Toujours d'Odilon Redon - La naissance de Vénus (vers 1912)
Pastel sur papier beige collé sur cartonContraste entre le fond diffus et la netteté du corps de la divinité aux contours précis, admirablement travaillé en réserve
Alphonse Osbert - Le Lyrisme dans la forêt (1910)
Pastel sur papier blanc collé sur cartonCe tableau constitue un archétype de la méthode du peintre : le paysage s'organise en bandes horizontales parallèles, correspondant aux différents éléments de la nature (la terre, l'eau, la forêt, le ciel), opposés à la verticalité des troncs d'arbres se prolongeant en dehors du tableau et des personnages féminins.
Antoine Calbet - Parmi les roses (1917)
Pastel et aquarelle sur papier collé sur cartonLe peintre pastelliste est connu pour ses compositions très lumineuses et son talent de coloriste.
Maintenant, y a plus qu'à mettre en pratique !!!
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Par Tolbiac204 le 8 Novembre 2017 à 10:00
Aujourd'hui, nous avons appris par le Bien Public, le journal de la Côte d'Or, que le tableau de la chapelle Saint-Anne de Courcelles, déposé cet été pour être restauré à Dijon, avait été remis en place.
Il s'agit d'une huile sur toile du Langrois Jean Tassel du deuxième quart du XVIIème siècle intitulée Présentation de la Croix à l'Enfant Jésus.
C'est l'Association "La Sauvegarde de l'art français" qui a lancé le projet du "Plus Grand Musée de France" qui vise à restaurer et faire connaitre des oeuvres d'art de proximité - tout en permettant à des étudiants d'acquérir de nouvelles compétences en participant à un projet formateur.
J'avais fait à l'époque un petit post sur le sujet : ICI.
Le devis, établi par la Direction régionale des affaires culturelles (DRAC), s'élevait à 10.000 euros. La moitié des fonds a d'abord été collectée par les étudiants de Science Po, le reste n'ayant malheureusement pas pu être apporté par la municipalité. C'est donc encore grâce au mécénat que les étudiants de Science Po ont pu collecter la somme restante (nous y avons participé tous les deux dans une modeste mesure !).
La restauration - effectuée à l'atelier dijonnais de Françoise Le Corre - a duré un mois et demi. L'essentiel du travail a été effectué autour de la couche picturale, un nouveau vernis ayant été également posé car l'ancien était très oxydé. Le cadre, quant à lui, a été restauré à l'atelier LP3 Conservation à Semur-en-Auxois : l'idée était de retourner à la couche originelle avec un faux marbre vert foncé, afin que cela soit plus cohérent avec le tableau.
C'est Florence Harvengt et son collègue Benoît Jacob, employés de l'entreprise, qui ont reposé le tableau dans la chapelle mais celui-ci n'est actuellement pas bien mis en valeur car il se situe derrière le tabernacle...
La commune parle de déplacer celui-ci et de changer l'éclairage de la Chapelle afin de permettre aux visiteurs éventuels de mieux pouvoir l'admirer. La chapelle est bien sûr fermée mais une affiche sur la porte indique comment se les procurer.
Affaire à suivre...
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Par Tolbiac204 le 30 Octobre 2017 à 23:00
Arlette, ma soeur, possède une carte pour des entrées illimitées au Louvre et les quinze premiers jours d'une exposition elle peut venir accompagnée de la personne de son choix.
C'est ainsi que j'ai visité dernièrement l'exposition en cours intitulée François Ier et l'art des Pays-Bas.
La bouche de métro donnant sur la Place Colette peut plaire - ou non - car elle est très clinquante tout de même : moi, je l'apprécie. Il s'agit d'une oeuvre d'art contemporain du plasticien français Jean-Michel Othoniel constituée par un ensemble de sphères d'aluminium et de perles en verre de Murano. Je viens d'apprendre par mon très cher ami "Wikipédia" qu'on l'appelle "le kiosque des noctambules".
L'exposition se trouve en sous-sol : il faut passer par la pyramide de Pei pour y accéder.
Eh oui... C'est pointu !
L'affiche de l'expo est un portrait équestre de François Ier par Jean Clouet.
Ce dernier est né à Bruxelles (la ville est située aux Pays-Bas bourguignons car la région appartient en ce temps là à la Bourgogne) en 1480. Il est issu d'une famille de peintres. En 1540, il obtient le titre de peintre du Roi François Ier. Pourtant, après sa mort il tombe dans un oubli à peu près complet pendant près de trois siècles, jusqu'en 1850, date à laquelle sont exhumés des documents prouvant son existence.
Tout comme son fils, François Clouet que l'on connait mieux, c'est un portraitiste.
L'exposition est très grande : on y voit beaucoup de peintures - je n'ai jamais vu autant de triptyques - mais elle comporte aussi des sculptures, des tapisseries, des vitraux et même des livres enluminés.
Voici le triptyque de l'adoration des Mages par Jean de Beer sans doute assisté par le Maître d'Amiens.
Sans doute peint pour le Couvent des Servites de Venise dont il provient, ce triptyque est le chef-d'oeuvre de Jean de Beer, figure centrale du maniérisme anversois. Il contient en germe les éléments de style que son élève supposé, le Maître d'Amiens, développa avec plus d'artifice. L'intervention de ce dernier est probable dans l'exécution des volets.
De plus près, j'admire les détails de la toile...
Voici un détail d'un autre triptyque intitulé "La mort de la Vierge".
L'extravagance du peintre éclate dans son approche même du sujet : seuls sept apôtres assez hallucinés entourent la Vierge à l'agonie tandis que les cinq autres s'affairent au fond à des tâches domestiques. La palette et la lumière sont étranges et les expressions très outrées.
L'exposition présente aussi des dessins tel celui-ci - à l'encre brune - représentant Aristote et Phyllis par le Maître d'Amiens.
L'histoire est amusante : dommage que le Louvre n'ait pas pris la peine de nous l'expliquer.
Aristote reprochait à son élève Alexandre de délaisser ses études pour l'amour d'une courtisane, Phyllis. Celle-ci se vengea en séduisant le philosophe et en se promettant à lui s'il se laissait chevaucher par elle. Il céda, et Phyllis prévint alors Alexandre en chantant un lai d'amour [petit poème narratif]. Ce dernier ne manqua pas de se moquer de son maître...
Voici maintenant un vitrail de Engrand et Jean Le Prince (l'un a fait le dessin, l'autre est le maître-verrier).
Ce vitrail - ainsi que plusieurs autres - a échappé à la destruction de l'église Saint-Vincent à Rouen en 1944 car ils avaient tous été déposés en 1939. Ils ont été depuis remontés dans l'église moderne Sainte-Jeanne-d'Arc située à sur la place du vieux marché à Rouen.
L'ascension du Christ par le Maître de l'Ascension de Berlin (entourage du Maître d'Amiens)
On ne voit que les pieds du Christ tout en haut du tableau...
Des sculptures maintenant : la Prudence et l'Espérance par Scipion Hardouin (peintre et sculpteur)
Ces statues ornaient le buffet d'un orgue de la Cathédrale Saint-Pierre de Beauvais et étaient destinées à être vues de loin.
Sainte Marie-Madeleine par l'atelier Beauvaisien
La sculpture beauvaisienne de la première moitié du XVIème siècle témoigne à la fois d'une richesse décorative comparable à la mode flamande contemporaine et d'une belle adaptation des techniques de polychromie brabançonne.
Il est amusant de remarquer que sur ce genre de sculptures, la mode féminine est celle de l'époque de François Ier et non celle à laquelle ont vécu les personnages.
La circoncision (anonyme flamand)
Probable production picarde des années 1525-1530
Détail : le bébé n'est pas le plus réussi...
Retable de la Passion (Noël Bellemare et son atelier)
Les différents compartiments de ce retable - qui se trouvait au XVIème siècle dans l'église parisienne du Saint-Sépulcre (détruite) - sont très comparables aux miniatures orant les livres d'Heures enluminés par Noël Bellemare et ses assistants.
Le baiser de Judas
Jésus porte sa croix
La mise au tombeau
Triptyque de la vie de la Vierge (le panneau central a été perdu)
La présentation de Jésus au Temple et la Naissance de la Vierge
Vitrail : La lamentation (Jean Chastelain et Noël Bellemare)
Vitrail : Le Jugement de Salomon
Ici encore, Le Louvre fait confiance à la culture générale des visiteurs...
Le différend opposa deux femmes ayant chacune mis au monde un enfant, mais dont l'un était mort étouffé. Elles se disputèrent alors l'enfant survivant. Pour régler le désaccord, Salomon réclama une épée et ordonna : « Partagez l'enfant vivant en deux et donnez une moitié à la première et l'autre moitié à la seconde ». L'une des femmes déclara qu'elle préférait renoncer à l'enfant plutôt que de le voir mourir. En elle, Salomon reconnut la mère. Il lui fit remettre le nourrisson et sauva donc la vie à l'enfant.
On arrive alors à la série des portraits.
Comme je l'ai dit précédemment, Jean Clouet est maître en la matière. En témoigne ce portrait de François Ier en tenue de grand apparat.
J'ai remarqué que dans les portraits suivants les mains ont toutes un rôle à jouer, une manière de donner de la vie aux personnages.
Portrait de Marguerite d'Angoulême, Reine de Navarre
Ce portrait fut sans doute exécuté en 1527 lors du second mariage de Marguerite, soeur de François Ier, avec Henri d'Albret, Roi de Navarre. Elle déclare alors prendre à son service le frère de Jean Clouet, peintre lui aussi.
Je la trouve vraiment très élégante avec son petit doigt levé servant de perchoir à son perroquet.
Portrait d'Eléonore d'Autriche, seconde épouse de François Ier
La Reine semble "ailleurs".Quel message veut-elle faire passer à la postérité... ?
Portrait de François Ier par Joos Van Cleve
Le peintre, peu habitué aux usages de la Cour, s'inspire ici de la disposition des mains adoptée précédemment par Jean Clouet.
Un objet soigneusement protégé par des vitres : le Livre d'Heures de François Ier est estimé à 10 millions d'euros...
Il se présente dans une reliure en or émaillée garnie de rubis et de turquoises et de deux intailles en cornaline. Il est accompagné de son signet.
L'arrestation du Christ par Grégoire Guérard
Beaucoup de vie dans ce tableau très expressif à la palette très vive
La Vierge à l'Enfant avec Saint Jean-Baptiste par Grégoire Guérard
J'aime le contraste entre les personnages aux couleurs vives du premier plan et le paysage tout en nuances de gris et d'ocre à l'arrière-plan.
De plus près...
J'ai découvert lors de cette exposition des tableaux bien particuliers : ils sont peints recto-verso. La dernière salle leur est principalement consacrée.
Celui-ci représente Jésus parmi les docteurs et le Songe de Saint-Joseph par le Maître de Dindeville (Bartholomeus Pons).
Jésus parmi les docteurs : intéressante peinture en camaïeu de brun...
Le songe de Saint-Joseph
Epilogue
A partir des années 1535-1540, l'essor du chantier décoratif du château de Fontainebleau qui donnera naissance à "l'Ecole de Fontainebleau" fait passer à l'arrière-plan le courant artistique issu du Nord. Celui-ci n'en coule pas moins de manière plus souterraine, prêt à resurgir de façon inattendue comme dans les deux dernières oeuvres - isolées - présentées ici.
Un très beau tableau de L'enfant prodigue chez les courtisanes d'un Anonyme flamand
Le thème du fils prodigue fut très prisé des artistes des Pays-Bas au XVIème siècle. Le fond précis de paysage parisien (on reconnait Notre-Dame de Paris) autorise à penser qu'elle fut peut-être peinte par un Flamand actif à Paris à la fin du règne de François Ier.
Cliquez sur l'image pour la voir en grand : elle le mérite.
Triomphe exquis au Chevalier fidèle (1548) - Anonyme, Amiens (présenté en cours de restauration)
Offert en 1548 à la Cathédrale d'Amiens par un prêtre, ce tableau célèbre sans doute l'édit de Blois pris contre les Luthériens hérétiques, par Henri II Roi de France depuis 1547.
On peut remarquer un grand contraste entre la partie haute du tableau très italianisante (représentant le char triomphal de la Foi catholique) et la partie basse, plus austère (consacrée aux luthériens).
A Paris il y a toujours de belles choses à voir !
L'exposition dure jusqu'au 15 janvier.
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Par Tolbiac204 le 17 Septembre 2017 à 23:30
Changeons de siècle pour cette nouvelle visite des Journées du Patrimoine : nous voici transportés au début du XVIème avec ce Château de la Reine Blanche - situé entre les rues des Gobelins, Berbier-du-Mets et Gustave Geoffroy dans le XIIIème arrondissement - dont l'histoire est étroitement associée à celle de la Bièvre recouverte ici même au début du siècle dernier.
Le Château de la Reine Blanche en 1898
Le château de la Reine Blanche actuellement
Notre jeune guide - bénévole - nous met tout de suite au parfum :
de château nenni, de reine itou !
L'origine du bâtiment remonterait au XIIIème siècle : Blanche de Bourgogne, épouse de Charles IV, l'aurait-elle occupé ? Marguerite de Provence, veuve de Saint-Louis, aurait-elle établi ici sa résidence ? Blanche de Castille aurait-elle fait construire pour son propre usage ce magnifique hôtel qui, au cours du Bal des Ardents (★) - que l'on ne peut localiser avec certitude -, aurait été détruit en 1392 par un incendie qui fit perdre la raison au roi Charles VI ?
(★) Voir l'histoire - pour le moins "croustillante" - ... en fin de post.
Aujourd'hui, le mystère de son nom demeure encore entier. Ce qui est sûr, c'est que le blanc a été jusqu'à Catherine de Médicis la couleur de grand deuil des reines au cours de leur veuvage.
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L'actuel bâtiment à tourelles a été construit au début du XVIème siècle, sur l'emplacement supposé de l'ancien château, par la famille Gobelin qui voulait en faire un usage d'habitation. Vers le milieu du XVIIIème siècle, il fut transformé en teinturerie. Il passa ensuite entre les mains de divers propriétaires, à la suite de multiples adjudications.
En 1827, la teinturerie fut transformée en tannerie. La couverture définitive de la Bièvre, en 1912, entraîna la disparition des activités du quartier, lequel déclinera irrémédiablement.
En 1980, son classement "Monument Historique" le sauva d'une destruction annoncée et inéluctable. En témoignent les photos présentées sur différents chevalets.
Le corps de logis, en pierre de taille, possède de belles fenêtres à meneaux typiques de la Renaissance et une tourelle à pans coupés coiffée d’une poivrière.
Notre guide nous montre les escaliers hélicoïdaux des deux tourelles, portés par d’élégantes vis spiralées en chêne (datant du XVIème siècle) d'un seul tenant sur une hauteur de 14 mètres (les deux étages).
Nous ne passerons pas ces belles portes : la demeure est privée.
La charpente de la tourelle est d'origine : elle peut supporter le poids des ardoises qui recouvrent la toiture de la tour poivrière. Une seule des poutres a été consolidée par des vis, toutes les autres sont chevillées d'origine.
A l’arrière, une galerie couverte à pans de bois surplombe une deuxième cour. Celle-ci mène aux anciens ateliers qui longent la rue Berbier-du-Metz : installés au bord de la Bièvre (aujourd’hui enfouie), ils ont abrité la manufacture de Jean Glucq, célèbre teinturier qui inventa le "bleu de Roi" et le "rouge à l'écarlate" à la demande de Colbert.
La photo ci-dessous montre l'état de délabrement des bâtiments avant leur restauration.
A la bonne heure, ça a changé de poil !
Sous les arcades, une exposition de photos montre le passé des lieux.
En 1787, la dénomination de la Bièvre était « ruisseau des Gobelins » en référence à Gilles Gobelin, teinturier à l'écarlate qui s'établit au Bord de la rivière sous François Ier, vers 1500, dans ce qui deviendra l'actuel ilôt de la Reine Blanche. Elle alimente de nombreuses tanneries, blanchisseries, teintureries et, entre autres, la fameuse manufacture des Gobelins.
La Bièvre au début du XXème siècle
Les façades en clayonnage de bois situées à gauche de la photo ont inspiré les architectes qui ont créé en 2000 les immeubles à usage d'habitation de la rue Berbier-du-Mets. Il s'agissait de greniers dans lesquels les tanneurs faisaient sécher leurs peaux.
La teinture des tissus et le tannage des peaux près de la Bièvre
Dans la cour, un puits
On peut y voir des claies utilisées comme séchoirs lorsque les fils venaient d’être teints.
(★) L'histoire du bal des ardents
Le 28 janvier 1393 à l'occasion du remariage de l'une de ses dames d'honneur, Catherine de Hainserville, allemande comme elle, Isabeau de Bavière, femme de Charles VI, donna un bal costumé dans "l'hostel de la Reyne Blanche" qui, suivant la tradition, devait être suivi d'un charivari (une sorte de carnaval).
Le roi Charles VI et cinq de ses gentilshommes se déguisèrent en animaux sauvages, masqués et revêtus d'une tunique enduite de poix et recouverte de plumes et d'étoupe. Des ordre stricts interdisent d'allumer les torches de la salle.
Malheureusement le frère du Roi, le duc Louis d'Orléans, - arrivé par la suite passablement éméché et surtout ignorant de la consigne - eut le funeste idée d'approcher son flambeau pour voir lequel des ces sauvages était le Roi et il mit malencontreusement le feu à l'un d'eux.
L'incendie se communiqua aux autres...
Par chance le souverain fut sauvé par sa jeune tante, la duchesse de Berry, qui l'enveloppa de son manteau. Quatre de ses gentilshommes déguisés en sauvages enchaînés (seul le Roi n'était pas enchaîné) périrent carbonisés.
Miniature tirée des Chroniques de Jean Froissart
On voit ici le Roi Charles VI s'abritant sous les jupons de sa tante, la duchesse de Berry, qui le sauva ainsi d'une mort certaine.
Miniature tirée des Chroniques de Jean Froissart
Il paraîtrait qu'en fait cette tragédie se passa plutôt à l'Hôtel Saint-Pol, résidence royale de Charles V et de Charles VI, située près du Quai des Célestins.
Croustillant, non ?
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Par Tolbiac204 le 17 Septembre 2017 à 23:00
Pour ce week-end des Journées du Patrimoine, nous avons choisi de visiter la Fondation Jérome Seydoux qui se trouve sur l'avenue des Gobelins, non loin de chez nous.
Bâti en 1869, anciennement théâtre à l'italienne (créé en 1906) puis cinéma (ouvert en 1934), le bâtiment - fermé depuis 2003 - a été complètement désossé en 2010, pour ne garder que la façade due à un jeune sculpteur encore inconnu, un certain Auguste Rodin.
Les deux figures sculptées représentent le Drame (l'homme) et la Comédie (la femme).
Derrière la façade de Rodin, Renzo Piano a édifié une coque de cinq étages recouverte de 5 000 volets protecteurs. Elevé au milieu d'un jardin, le bâtiment contemporain fait resplendir le luxe des matériaux. Outre sa verrière aux deux niveaux supérieurs, l'intérieur mêle un subtil mélange de bois et d'acier, qui offre à la Fondation Jérôme Seydoux - Pathé un caractère unique en son genre.
La façade vue de l'intérieur
Reconnue d'utilité publique le 9 mai 2006, la Fondation Jérôme Seydoux-Pathé oeuvre à la conservation et à la mise à disposition du public du patrimoine historique de Pathé.
Regroupant l’ensemble des collections non-film de Pathé depuis sa création en 1896, la Fondation Jérôme Seydoux-Pathé est un centre de recherche destiné aux historiens, aux enseignants et aux étudiants, ainsi qu’à tous ceux qu’intéresse le cinéma. Par son activité, elle œuvre à la promotion de l’histoire du cinéma à travers l’histoire de Pathé.
L’exceptionnel fonds d’archives de la Fondation, régulièrement enrichi par de nouvelles acquisitions, regroupe plusieurs collections. Elles comprennent un riche ensemble de matériel iconographique et publicitaire, des documents imprimés, des appareils et des accessoires cinématographiques, des objets, une bibliothèque d’ouvrages et de périodiques, ainsi que les archives administratives et juridique de Pathé depuis sa création. A ce jour, le catalogue Pathé se compose de plus de 10 000 films dont 9 000 films muets.
Plan-coupe de la Fondation
Pour accéder à l'étage réservé aux chercheurs, il faut monter cinq étages - à pied - puis emprunter ce petit escalier en colimaçon.
Le centre de recherche et de documentation est dédié à l’histoire du cinéma. Il offre la possibilité aux chercheurs, aux étudiants et à tous de consulter sur rendez-vous l’intégralité des fonds Pathé.
Ils sont vernis les deux chercheurs qui occupent ces bureaux...
Top la salle de réunion !
La suite de la visite se passe au premier étage : il s'agit de la galerie des appareils.
Dans les escaliers qui y mènent, des affiches de films.
La galerie expose 150 appareils cinématographiques, collection de la Fondation Jérôme Seydoux-Pathé. Cette exposition permanente retrace l'histoire et l’évolution des caméras et projecteurs Pathé depuis 1896 jusqu’aux années 80.
Lorsque Charles Pathé assiste à une projection cinématographique, il est immédiatement convaincu de l'avenir de l'invention. En parallèle à son activité première, la photographie, il se consacre au cinématographe à partir de 1896. Il en développe tous les métiers, dont celui de la fabrication des appareils.
Les appareils présentés sont tant destinés aux professionnels qu'à des activités de loisir.
Gros projecteurs et affiches jalonnent les murs de la salle.
Le son n'est pas oublié...
Caméras datant de 1903 à 1977
Redescendant au rez-de-chaussée, on accède à un petit jardin qui permet de voir la coque du bâtiment créé par Renzo Piano.
A cet étage, le début de l'exposition actuelle "Sport et cinéma, une enfance partagée" qui donne à voir la richesse et la complexité de la relation née dès la fin du XIXème siècle entre le sport et le cinéma.
Suite à quoi, nous sommes descendus au sous-sol où se trouve la salle de projection de la Fondation. Deux petits films muets doivent nous y être projetés : l'un s'intitule "Rigadin aime le sport" et l'autre, j'ai oublié...
En attendant le début de la séance, nous avons droit à de la publicité pour l'exposition actuelle...
La prochaine exposition s'intitulera "Octobre 1917, une Révolution en images"... C'est en effet très bientôt le centenaire de la Révolution russe.
Nous avons découvert l'acteur de cinéma muet Charles-Ernest René Petitdemange (dit Prince Rigadin) qui joue le rôle de Rigadin dans le film intitulé "Rigadin est un fameux escrimeur". Le film date de 1912.
Daniel Mermet (de France-Inter) présente l'acteur dans cette petite vidéo.
Je pense que j'irai prochainement voir un film à la Fondation Jérome Seydoux...
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